mardi 23 décembre 2014

Les défenseurs zélés de la France dont la République française se passerait bien (2/3) Le délire des pharisiens et des Tartuffe Franco-Libanais sur les crèches de Noël (Art.261)


Dans ce deuxième volet de cette série d’articles que je consacre à ces défenseurs zélés de la France dont la République française se passerait bien, j’aborderai un autre sujet d’actualité brûlant, celui du retrait d’une crèche du Conseil général de Vendée et la pression faite sur les maires Front National de Béziers, Robert Ménard, et de l’UMP de Melun, Gérard Millet, pour démonter les crèches installées dans leurs mairies, en pleine période de Noël.

J’ai suivi avec beaucoup d’intérêt, et d’amusement il faut dire, les réactions que ces événements ont suscitées en France, mais surtout au Liban. Une crèche c’est « un homme, une femme, un enfant, quelques bêtes », titrait L’Orient-Le Jour (OLJ) la semaine dernière. Dès la première phrase, le ton est donné : « Elle doit être bien malade, la France laïque, dans son cœur, dans sa tête, dans son identité et son estime de soi, pour s'offusquer tout à coup de la présence des crèches dans les lieux publics à la veille de Noël ». Etant chargé par Laurent Fabius, le ministre français des Affaires étrangères, mon voisin de palier sur Facebook, de répondre à ce grotesque constat, je voudrais rassurer la journaliste libanaise d’emblée : la France se porte comme un charme, ce sont les zélés qui pètent des durites ces derniers temps.

Zappons cette arrogance déplacée et admettons son expression. La journaliste de l’OLJ rajoute un peu plus loin : « S'il faut supprimer les crèches, autant supprimer toute cette fête indissociable de la tradition et de la foi chrétiennes, allez, par respect pour les autres communautés, selon l'argument démagogique avancé par les champions de cette étrange cause. » Il faut vraiment rien connaitre de la France pour penser ne serait-ce que la moitié d’un quart de seconde que dans la République française, « les champions de cette étrange cause » (cette cause concerne la laïcité), ordonnent le retrait de ces crèches « par respect pour les autres communautés » (sous-entendez musulmane et non shintoïste), en se basant sur un « argument démagogique » (le respect de la loi). Trois grotesques réflexions, c’est un peu fâcheux pour quelqu’un qui prétend informer les citoyens libanais sur l'actualité française. Ce ne sont ni les fanatiques athées de Gauche, ni les musulmans, ni les bouddhistes, ni les shintoïstes, ni les fans de Marilyn Manson qui dictent leurs lois en France. Il faut cesser ce mensonge. Dans l'affaire de Vendée, c’est le tribunal administratif de Nantes qui a ordonnée au Conseil général de retirer la crèche de la Nativité. La décision judiciaire n’est motivée ni par la christianophobie ni par l’islamophilie, ni par respect de quoi que ce soit, ni par irrespect de qui que ce soit, mais uniquement en application de la loi du 9 décembre 1905, qui concerne la « Séparation des Eglises et de l’Etat » et qui précise dans son premier article que « La République (française) assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l'intérêt de l'ordre public. » Et des restrictions, il y en a, n'en déplaise aux croyants zélés. En vertu de l’article 28, « il est interdit, à l'avenir, d'élever ou d'apposer aucun signe ou emblème religieux sur les monuments publics ou en quelque emplacement public que ce soit, à l'exception des édifices servant au culte, des terrains de sépulture dans les cimetières, des monuments funéraires, ainsi que des musées ou expositions ». C’est clair comme l’eau de source. A l’époque où l’on a voté cette loi, en 1905, il y avait sept musulmans et deux shintoïstes tout au plus en France métropolitaine. Donc, il faut cesser cette malhonnêteté intellectuelle de sous-entendre que l’interdiction des crèches de Noël dans les lieux publics est liée de près ou de loin à l’islam et aux musulmans de France.

Ceci dit, on note bien sûr une certaine tolérance des manifestations religieuses dans l’espace public en France. Tout est laissé à l’appréciation individuelle, même au niveau des juges. Voilà pourquoi les tribunaux administratifs de Montpellier et de Melun ont donné raison aux maires de Béziers et de Melun, alors que celui de Nantes à donner tort au Conseil général de Vendée. On a déjà vu des crèches de Noël place de l’Hôtel de Ville à Paris. Les crèches de Provence et leurs santons font partie du patrimoine cultuel et culturel de la région. On fait tous les ans à Pâques le chemin de croix à Montmartre, en plein Paris. Mais, toutes ces manifestations religieuses sont au sens strict de la législation, des violations de la loi de 1905. Donc, l’interprétation de la loi n’est pas aussi rigide que certaines grenouilles de bénitier voudraient le faire croire. En tout cas, l’affaire de la crèche de Vendée sera rejugée en appel et l’affaire est portée devant le Conseil d’Etat. En attendant, j’aimerai rappeler aux zélés, la sagesse de l’Eglise catholique qui n’a jamais polémiqué sur cette question. Le porte-parole des évêques de France, Mgr Bernard Podvin, a rappelé à l’occasion de cette polémique que « L’Église catholique respecte la neutralité de l’État (français) ».

Ces polémiques récurrentes ont souvent pour origine des réseaux d’extrême droite qui aussitôt l’affaire est connue, lance une campagne politique pour dénoncer l’athéisme fanatique de la gauche, la christianophobie et l’islamisation de la France. Mais pas uniquement, comme on le voit avec cet article dans le principal quotidien libanais francophone. « A quoi bon faire le choix d'un État laïc si c'est pour ériger la laïcité en une religion supplémentaire, armée de dogmes consternants ? » Non seulement, Fifi Abou Dib fait fi de la loi de 1905, dont l’existence n’est même pas mentionnée dans sa note, mais elle a le culot de parler de « dogmes consternants ». A moins qu’elle ignore vraiment qu’une loi existe et que nul n’est censé l’ignorer ? Toujours est-il qu’il faut avoir une vue courte pour ne pas comprendre que la laïcité instaurée par la loi de 1905, n’est dirigée contre personne en particulier. Bien au contraire, elle a comme principal objectif de régler la vie des communautés -celle des athées comprise, qui pense qu'Abraham, Bouddha, Jésus et Mahomet, sont des gourous comme les autres- dans le respect de tout un chacun. C’est le meilleur moyen qui soit d’assurer ce vivre ensemble en diminuant les risques des surenchères religieuses et des confrontations communautaires, qui dévorent le Liban, soit dit au passage. Imaginez qu’on laisse s’installer des crèches de Noël dans les mairies, en violation de la loi de 1905 comme le souhaitent beaucoup de Franco-Libanais, figurez-vous que les fonctionnaires municipaux devront assurer le service du mois de décembre jusqu’au mois de janvier, pour satisfaire les Orthodoxes comme les Catholiques et les Protestants. Qui dit crèche à Noël, dit chemin de croix à Pâques avec les processions du Vendredi Saint. Par ailleurs, il faudrait organiser des pique-niques champêtres dans les parcs et jardins municipaux à l’occasion de Eid el-Fotr marquant la fin du ramadan. Et pour Eid el-Adha, il faudrait fermer les yeux sur les sacrifices qui devraient se faire sur les perrons des mairies. Et encore, chez les descendants d’Ismaël, il n’y a que deux grandes fêtes religieuses. Chez leurs cousins du côté d’Isaac, les célébrations et les commémorations juives occupent environ 150 jours de l’année, shabbat compris. Donc, pour satisfaire les orthodoxes juifs, il va falloir changer le décor des mairies tous les deux jours ! Vous pensez qu’avec les bouddhistes c’est plus simple ? Détrompez-vous. L’anniversaire de Siddhārtha Gautama, Bouddha, diffère d’une communauté à l’autre, on aura au moins quatre dates dans l’année. Et c’est sans oublier les athées attachés à la Révolution française qui réclameront sans doute de remettre le Culte de la Raison et de l’Etre suprême. Ah la raison, il est grand temps de la remettre dans les esprits ! Enfin bref, vous l'avez compris, Tartuffe ou L’Imposteur apparaitrait comme une tragédie par rapport au bordel comique que nous aurons dans les mairies des 36 000 communes de France et de Navarre.

On voit bien où peut conduire le délire de certains défenseurs zélés de la France, qu'on retrouve dans l’Hexagone et au pays du Cèdre : à transformer la République française, en une tour de Babel. Qu’importe, rien ne peut retenir la suffisance libanaise. « Le Liban aligne ses 18 confessions (...) comme un miracle de coexistence rendu possible par l'ouverture d'esprit de ses citoyens (...) Jamais nous n'empêcherons l'une de nos communautés confessionnelles de célébrer ses fêtes et de les partager dans la joie. Et sans doute dans ce libéralisme-là existe-t-il davantage de laïcité que dans tout l'Hexagone réuni ». C’est c’là oui ! Foutaises. Mais bordel, qui en France empêche qui que ce soit « de célébrer ses fêtes et de les partager dans la joie »? Et dites-moi, votre joie serait-elle si réprimée sans des crèches dans tous les coins de rues, de gares, de mairies et de supermarchés ? Et après, on s’étonne pourquoi le Liban est dans un sacré merdier et le restera pour longtemps ! Au lieu de s’inspirer de la France, les zélés du Liban, veulent importer dans ce pays paisible et laïc, l’esprit sectaire qui n’en finit pas de ravager notre pays et d’enfoncer ses 18 communautés dans l’enfer communautaire, qui nous a déjà couté une guerre civile de 150 000 morts, que certains semblent avoir déjà oublié.

Je rassure tous les défenseurs zélés de la France, d’ici et d’ailleurs, que tout leur zèle autour de la crèche de Noël et les racines chrétiennes de la France, qui feront l’objet du troisième volet de cette série d’articles, est irrecevable devant Dieu, leur idolâtrie n’ayant pas cours dans l’au-delà. Ici-bas, la Nativité est représentée là où elle est digne de l’être. Certainement pas aux supermarchés et dans les mairies comme le souhaitent les chrétiens zélés. On peut l’admirer en permanence en se présentant n’importe quelle journée ensoleillée de l’année devant les magnifiques vitraux du XIIIe siècle du portail royal de la Cathédrale Notre-Dame de Chartres. On peut aussi s’émerveiller devant la crèche de la Nativité de Notre-Dame de Paris. Elle est magnifique où elle est, à l’intérieur de la cathédrale parisienne. C’est là où elle devrait être, dans son environnement, et nulle part ailleurs, par respect pour Jésus, déjà pour commencer. Et s’il y a lieu de s’inquiéter, c’est sur la dérive consumériste autour de la naissance de Jésus, ce fils de Dieu, à en croire la tradition chrétienne, ce fils de charpentier, à en croire les Evangiles, le fils de cette juive nommée Marie, qui est né dans une étable, venu au monde pour sauver l’humanité comme disent ses fidèles, et lui apprendre l’humilité, la tolérance, la solidarité, le pardon et l’amour du prochain, ennemis compris. Dieu sait à quel point nous sommes à des années-lumière de tout cela. Les Pharisiens et les Tartuffe zélés des temps modernes ont transformé Noël en une fête folklorique et commerciale. Si Jésus revenait sur Terre, il les flagellerait, comme il l’a fait avec les marchands du Temple il a près de 2 000 ans. 


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